Qui donc connaît les flux et reflux réciproques
de l'infiniment grand et de l'infiniment petit,
le retentissement des causes dans les précipices de l'être,
et les avalanches de la création ?
(Victor Hugo, Les Misérables)

samedi 11 juillet 2015

Retour sur les systèmes quantiques à deux niveaux, suite. Billet N° 17

Le billet n°15 était consacré à la caractérisation d’un système quantique à deux niveaux, un “quantum bit “, ou qubit, en tant qu’objet isolé. Après en avoir rappelé quelques éléments, j’aborde ici les systèmes formés de deux qubits. Je commence par décrire l’espace des états de ces systèmes, puis les opérateurs agissant sur cet espace. Je traite ensuite de différents types de mesures. Les ouvrages sur lesquels je me suis appuyé sont encore :
  1. Roger Penrose, “A la découverte des lois de l’Univers”, editions Odile Jacob 2007, chapitres 22 (en particulier pages 535-540) et 29 (pages 760 et suivantes)
  2. Claude Cohen-Tannoudji, Bernard Diu, Franck Laloë, “Mécanique Quantique 1” Hermann Enseignement des Sciences 1977, Chapitre IV (pages 385-400)
Mon objectif, en rédigeant ces billets sur les quantum bits, est de m’approprier les connaissances nécessaires pour comprendre la seconde partie de l’article Deutsch/Marletto (cf billet n° 16) traitant de l’information quantique. C’est d’ailleurs pourquoi je fais brièvement référence à certaines notions développées dans cet article - états distincts, discernables, statistiquement discernables - pour y revenir prochainement.



Les états d’un quantum bit , rappel.
L’état quantique d’un qubit isolé s’identifie à une direction spatiale (une droite orientée) dans notre espace ordinaire à trois dimensions. Après choix dans cet espace d’un repère directionnel constitué de trois axes Ox, Oy, Oz orthonormés, un tel état se résume donc à la donnée de deux angles, une co-latitude θ (angle de la direction avec l’axe Oz) et une longitude φ. Mais, pour des raisons dont les succès de la théorie quantique ont montré la véracité, il est aussi très utile de représenter l’état d’un qubit par un vecteur d’un espace vectoriel, l’espace “de Hilbert” H² ; concrètement, par un doublet {a,b} de nombres complexes, composantes d’une combinaison linéaire de deux vecteurs de cet espace H² choisis comme base. Le formalisme quantique conduit à préférer, pour cette seconde représentation de l’état, la notation |a,b> (que nous substituons donc aux notations {a,b} ou |{a,b}> utilisés dans le billet n° 15). Les vecteurs de base s’écrivent alors |1,0> et |0,1> et, par définition, |a,b> = a |1,0> + b |0,1>. Le produit scalaire - ou produit intérieur - de deux états |a,b> et |c,d>, dans cet ordre, ce produit n’étant pas commutatif, vaut āc + b̄d. Il se note <a,b|c,d>, la "barre" surlignant la lettre signifiant le passage au nombre complexe conjugué.

Le passage entre les deux représentations, c.a.d. entre la représentation angulaire [θ,φ] et la représentation |a,b>, est déterminé par le choix des directions associées aux deux vecteurs de base dans l’espace de Hilbert. Un choix courant est celui des deux directions opposées de l’axe Oz, respectivement spécifiées angulairement par θ = 0, associée ainsi à |1,0> et θ = π, associée à |0,1>. La correspondance entre |a,b> et [θ,φ] s’établit alors ainsi :

  1. |a,b> → [θ,φ] : θ = 2 Arctg (B/A), φ = β - α, où A et α, B et β sont respectivement les modules et arguments des nombres complexes a et b.
  2. [θ,φ] → |a,b> : a = u cos(θ/2) exp(-i φ/2) b = u sin(θ/2) exp(i φ/2)], où u est un nombre complexe quelconque : il existe une infinité de vecteurs |a,b> représentant le même couple angulaire [θ,φ], donc le même état du qubit assimilé à une direction spatiale orientée, chacun de ces vecteurs associé à une valeur de u particulière. La valeur u = 1 correspond à une représentation canonique, avec un vecteur |a,b> normalisé.
Conformément à un usage courant, les vecteurs de la base |1,0> et |0,1>, seront ici notés respectivement |↑> et |↓> ; l’état |a,b> du qubit s’écrit donc aussi a|↑> + b|↓>, combinaison linéaire des deux vecteurs orthonormés |↑> et |↓>.

De la nature comparée des deux représentations
Des deux représentations de l’état d’un quantum bit, la première, la représentation angulaire, est liée a l’assimilation de cet état une direction spatiale. Elle apparaît bien être la plus “concrète”. La seconde, un vecteur d’un espace de Hilbert, apparaît abstraite, utile seulement par sa commodité lors des calculs qui permettent à la théorie quantique d’expliquer et de prédire les faits expérimentaux du domaine. Mais les choses sont en fait plus complexes. 

L’assimilation de l’état d’un qubit isolé à une direction spatiale doit en effet être prise avec quelques réserves : d’un point de vue classique, cette assimilation implique que l’on soit capable, par un instrument de mesure adéquat, de distinguer deux directions différentes du qubit ; la précision de l’instrument fournit la limite angulaire en deça de laquelle deux directions ne sont plus discernables, mais rien ne s’oppose théoriquement à une précision infinie. Mais le qubit ne relève justement pas d’une théorie classique, mais d’une théorie quantique. Car aucun instrument de mesure ne permet avec certitude de dire que deux états du qubit sont différents : sauf dans certains cas particuliers, deux états du qubit, donc deux directions dans cette interprétation spatiale, sont indiscernables, alors même qu’ils sont distincts. Les cas particuliers sont ceux où les deux états sont assimilables à deux directions spatiales exactement opposées l’une à l’autre. Il existe alors un instrument de mesure capable par exemple de donner une réponse positive lorsque le qubit a été “préparé” dans l’une de ces directions, et négative lorsque le même qubit a été préparé dans la direction opposée. Ce, avec certitude, c.a.d. que le même instrument donnera toujours les mêmes réponses en face des mêmes cas. 

On pourrait alors se demander si parler d’états distincts a encore un sens. La réponse a cette question est oui, sous réserve d’admettre un certain postulat. Ce postulat concerne la possibilité de préparer un qubit dans le même état un nombre infini de fois, - en pratique un nombre aussi grand que nécessaire. La théorie quantique du qubit montre alors que deux états distincts sont statistiquement discernables. Des mesures répétées sur le qubit préparé (à chaque fois) sur le premier état, puis sur le second, produisent des séries de résultats qui permettent d’affirmer avec une certitude croissante, que les deux états sont bien distincts.

Nous allons voir dans la suite que l’assimilation de l’état d’un qubit comme direction spatiale ne s’étend pas non plus sans réserve aux systèmes de deux qubits : l’état d’un tel système ne se résume pas, dans le cas général, au couplage de deux directions.

Espace des états d’un système de deux quantum bits

Considérons donc maintenant deux qubits. Une idée qui vient à l’esprit pour caractériser l’état d’un tel couple est la suivante : on part des descriptions de chacun des qubits comme s'ils étaient séparés : les deux qubits possèdent donc chacun leur propre état, par exemple l’état |ψ₁> = |a₁,b₁> pour le premier, l’état |χ₂> = |c₂,d₂> pour le second. L’état global du couple serait alors l’association - le "couplage" - des deux états, mathématiquement leur produit tensoriel |ψ₁> ⊗ |χ₂>, noté aussi |ψ₁>|χ₂>. 

Notons que l’ordre d’écriture du produit tensoriel n’a pas d’importance : |ψ₁> ⊗ |χ₂> et |χ₂> ⊗ |ψ₁> désignent le même objet. La lettre grecque identifie un état. L’indice marque si cet état est celui du qubit n° 1 ou celui du qubit n° 2. Si l’on prend la précaution, dans les notations, de respecter toujours le même ordre, en plaçant (par exemple) d’abord ce qui concerne le qubit n° 1 puis ce qui concerne le qubit n° 2, l’utilisation des indices n’est plus nécessaire ; c’est ce qui est fait dans une convention généralement adoptée, |ψ>|χ> remplacant ainsi |ψ₁>|χ₂>. Dans ce qui suit, je maintiens cependant les indices d’identification des deux qubits, au moins dans la notation des vecteurs de base des espaces d’états considérés.

Cette manière de construire les états d’un système de deux qubits est cependant incomplète. La physique quantique enseigne en effet que l’espace des états d’un système constitué de plusieurs éléments est le produit tensoriel des espaces de chacun des éléments. Donc, dans le cas présent, l’espace de Hilbert H²⊗H², dont les vecteurs sont représentés, après choix d’une base, par un quadruplet quelconque de nombres complexes |m,n,p,q>. Or, comme nous allons le voir, un tel ensemble de vecteurs est plus large que celui obtenu par couplage d’états individuels.

L’état d’un tout n’est pas (nécéssairement) le produit de l’état des parties
Montrons donc que les vecteurs |m,n,p,q> ∈ H²⊗H² ne se réduisent pas, en général, au produit tensoriel de deux états individuels |ψ>|χ>. Pour cela, choisissons pour base de H²⊗H² celle formée des produits tensoriels des bases individuelles |↑>= |1,0> et |↓>=|0,1> de chacun des deux qubits ; donc, en placant le qubit n° 1 en tête de chaque produit, la base :

[ |↑₁>|↑₂>, |↑₁>|↓₂>, |↓₁>|↑₂>, |↓₁>|↓₂> ]

Un état quelconque du système global s’écrit donc  :

|m, n, p, q> = m|↑₁>|↑₂> + n|↑₁>|↓₂> + p|↓₁>|↑₂> + q|↓₁>|↓₂>

Le produit tensoriel des états individuels 
|a, b> ⊗ |c, d> = [a|↑₁>+ b|↓₁>] ⊗ [c|↑₂>+d|↓₂>] 
se développe de son coté comme

|ac, ad, bc, bd> = ac|↑₁>|↑₂> + ad|↑₁>|↓₂> + bc|↓₁>|↑₂> + bd|↓₁>|↓₂>

Pour qu' un état global |m, n, p, q> quelconque se ramène au produit tensoriel des deux états individuels, il faut que l'on puisse trouver quatre nombre complexes a,b,c,d tels que ac = m, ad = n, bc = p, bd = q. Cela n'est en général pas possible, sauf si les composantes m,n,p,q satisfont aux conditions restrictives m/n = p/q

Intrication
Lorsque l’état global n’est pas le produit tensoriel de deux états individuels, on dit qu’il s’agit d’un état intriqué. Il s’agit d’une propriété intrinsèque, indépendante du choix des bases choisies pour le premier et le second qubit : si un état Υ ne se réduit pas au produit [a|↑₁>+ b|↓₁>] ⊗ [c|↑₂>+d|↓₂>] avec les bases orthonormées |↑₁>, |↓₁> et |↑₂>, |↓₂> , il en sera de même pour tout autre choix de bases orthonormées |⤉₁>, |⤈₁> et |⤉₂>, |⤈₂>


Représentations angulaires

Comme abondamment rappelé çi avant, l’état d’un seul quantum bit est assimilable à une direction dans notre espace ordinaire 3D, repérée par une colatitude θ et une longitude φ. Que peut-on dire pour l’état d’un système de deux qubits ?


Image de gauche ; cas du produit tensoriel :
état assimilable à deux directions ψ et χ   
   Image de droite ; cas général : 
dédoublement ψ→ψ¹ et ψ², χ→χ¹ et χ²   

Cas d’un état non intriqué 
Le cas où l’état du système est le produit tensoriel de deux états individuels |ψ> = |a,b> et |χ>  = |c,d> ne soulève pas de difficulté. La situation est illustrée dans la partie gauche de la figure çi dessus :

  1. l’état |ψ> du qubit n°1 s’identifie à une direction codée [θ₁, φ₁] dans un système de référence Ox₁, Oy₁, Oz₁ où la direction Oz₁ représente l’état |↑₁> et la direction Ox₁ l’état (1/√2) [|↑₁> + |↓₁>]. 
  2. l’état |χ> du qubit n° 2 s’identifie à une direction codée [θ₂, φ₂] dans un système de référence Ox₂, Oy₂, Oz₂. où la direction Oz₂ représente l’état |↑₂> et la direction Ox₂ l’état (1/√2) [|↑₂> + |↓₂>].

Cas d’un état intriqué
Le cas d’un état quelconque - un état intriqué - est plus complexe ; pour le comprendre, écrivons cet état de deux façons différentes :
  
|m,n,p,q> = m|↑₁>|↑₂> + n |↑₁>|↓₂> + p|↓₁>|↑₂> + q|↓₁>|↓₂>
= |↑₁>⊗ (m|↑₂> + n|↓₂>) + |↓₁>⊗ (p|↑₂> + q|↓₂>)
= |↑₂>⊗ (m|↑₁> + p|↓₁>) + |↓₂>⊗ (n|↑₁> + q|↓₁>)

La première des réécritures factorise ↑₁> puis |↓₁> . Elle fait apparaître deux directions pour le qubit n°2. Les co-latitudes et les longitudes de ces deux directions sont celles de la représentation angulaire du couple |m,n> pour la première, celles de la représentation angulaire du couple |p,q> pour la seconde. Sur la figure (à droite, en bas) ces deux directions sont désignées par les symboles χ¹ et χ² 

La seconde des réécritures factorise |↑₂> puis |↓₂>. Elle fait apparaître deux directions, cette fois pour le qubit n° 1. Leurs co-latitudes et longitudes sont celles de la représentation angulaire du couple |m,p> pour la première et celles de la représentation angulaire du couple |n,q> pour la seconde. Sur la figure (à droite, en haut), ces deux directions sont désignées par les symboles ψ¹ et ψ²

Les états individuels χ¹ et χ² d’une part, ψ¹ et ψ² d’autre part, apparaissent à travers un jeu d’écriture. Avec un autre choix de vecteurs de base, |⤉₁>, |⤈₁> et |⤉₂>, |⤈₂>, par exemple, ces états seraient différents. Mais ils correspondent cependant à une certaine réalité physique : χ¹ et χ² sont ainsi les deux états dans lesquels pourra se retrouver le qubit n° 2, juste après qu’un expérimentateur ait effectué une mesure de l’orientation du qubit n° 1 sur l’axe Oz₁. De même, ψ¹ et ψ² sont-ils les deux états possibles du qubit n° 1, après qu’un expérimentateur ait effectué une mesure de l’orientation du qubit n° 2 sur l’axe Oz₂. Je reviendrai sur ces questions à la fin du billet.

Opérateurs. 

Pour traiter des mesures sur un système de deux qubits, il est nécessaire de comprendre comment les opérateurs agissant séparément sur chacune des parties de ce système peuvent se combiner pour former des opérateurs agissant sur l’espace d’états global. Les considérations qui suivent se trouvent dans tout manuel de physique quantique (voir par exemple dans l’ouvrage Cl. Cohen-Tannoudji et al. déjà cité, chap. II, pages 154-160). 

Produit tensoriel de deux opérateurs.
Soit donc deux opérateurs (linéaires) M₁ et M₂ agissant respectivement sur les états du premier et du second qubit.
M₁ transforme l’état |ψ₁> en M₁|ψ₁> ; de même M₂ transforme |χ₂> en M₂|χ₂>. L’action simultanée des deux opérateurs, agissant chacun d’entre eux dans son propre espace H², transforme donc le produit tensoriel |ψ₁>⊗|χ₂> en un autre produit tensoriel. Cette transformation, savoir :
|ψ₁>⊗|χ₂> → [M₁|ψ₁>] ⊗ [M₂|χ₂>]

suffit à spécifier de façon unique un opérateur agissant cette fois dans H²⊗H², naturellement appelé produit tensoriel de M₁ et de M₂. Nous avons par définition :

M₁ ⊗ M₂ |ψ₁>⊗|χ₂> = [M₁ |ψ₁>] ⊗ [M₂|χ₂>

La remarque faite à propos de l’ordre d’écriture du produit tensoriel de deux vecteurs se transpose au produit tensoriel d’opérateurs : M₁ ⊗ M₂ et M₂ ⊗ M₁ désignent le même objet. Comme précédemment avec les états, nous adoptons la convention consistant à privilégier, dans la notation d’un produit tensoriel, l’écriture M₁ ⊗ M₂.

Vecteurs et valeurs propres d’un produit tensoriel
Si |ψ₁> et |χ₂> sont respectivement vecteurs propres de M₁ et M₂, avec les valeurs propres λ₁ et λ₂, alors |ψ₁>⊗|χ₂> est vecteur propre de M₁ ⊗ M₂, avec la valeur propre λ₁λ₂.

Prolongements d’opérateurs
Soit M₁ un opérateur sur le qubit n° 1. L’opérateur M₁ prolongé, noté M̃₁, est l’opérateur agissant sur la totalité du système des deux qubits, mais qui, sur tout état prenant la forme d’un produit tensoriel |ψ₁>⊗|χ₂> transforme par M₁ l’état |ψ₁> du qubit n°1, en laissant l’état du qubit n° 2 inchangé ; c’est donc l’opérateur vérifiant :

₁|ψ₁>⊗|χ₂> = [M₁|ψ₁>]⊗|χ₂>

Autrement dit, c’est le produit tensoriel de M₁ et de l’opérateur identité : M̃₁ = M₁ ⊗ I₂


Soit de même M₂ un opérateur sur le qubit n° 2. L’opérateur M₂ prolongé, noté ₂ est l’opérateur agissant sur la totalité du système des deux qubits, mais qui, sur tout état prenant la forme d’un produit tensoriel |ψ₁>⊗|χ₂> transforme par M₂ l’état |χ₂> du qubit n°2, en laissant l’état du qubit n° 1 inchangé ; c’est donc l’opérateur vérifiant :


M̃₂|ψ₁>⊗|χ₂> = |ψ₁>⊗[M₂|χ₂>]

Autrement dit, c’est le produit tensoriel de l’opérateur identité et de M₂ : M̃₂ = I₁ ⊗ M₂

Composition en série des opérateurs prolongés
Calculons ₁|ψ₁> ⊗ |χ₂>. De par leur définition, 
  1. ₁ transforme |ψ₁> ⊗ |χ₂> en [M₁|ψ₁>] ⊗ |χ₂> . 
  2. ₂ transforme [M₁|ψ₁>] ⊗ |χ₂> en [M₁|ψ₁>] ⊗ [M₂|χ₂>] = M₁⊗M₂ |ψ₁> ⊗ |χ₂> 
En définitive, ₁ et M₁⊗M₂ sont deux écritures du même opérateur.
Or M₁ ⊗ M₂ et M₂ ⊗ M₁ représentent le même objet. On en déduit que les compositions ₁ et ₂ ont strictement la même action, les deux opérateurs prolongés commutent. On va voir en traitant de la question des mesures l’importance de cette propriété.



Mesures “simultanées” sur un système de deux quantum bits.

Rappelons la démarche effectuée pour un seul qubit (cf Billet n° 15), où nous cherchions à mesurer l’orientation du qubit dans une certaine direction de référence, déterminée par l’instrument de mesure et spécifiée par un vecteur |a, b>. Cet instrument était construit pour délivrer une information binaire, constituée de deux réponses opposées possibles, notées ici + et - et dont l’interprétation intuitive était la suivante : 

  1. celle du + était que l’orientation du qubit, avant mesure, était probablement plus proche de la direction de référence |a, b> 
  2. celle du - était que l’orientation du même qubit, toujours avant mesure, était probablement plus proche de la direction opposée |-b̄, ā>
L'emploi de l’expression “plus probablement” est motivée par le fait que, pour la quasi totalité des états du système, la réponse que la mesure va fournir est fondamentalement incertaine. On ne peut que lui attribuer qu’une certaine probabilité. Seuls des états très particuliers fourniront des réponses déterminées. La théorie quantique d’un tel système a justement pour but de rendre compte des données d’expérience produites par l’instrument de mesure, entre autres :
  1. les fréquences respectives d’apparition des deux réponses, lors de mesures répétées sur des systèmes distincts, mais préparés de façon identique. 
  2. les similarités entre les réponses obtenues lors de mesures successives effectuées sur le même système.

L’appareil mathématique au coeur de la théorie, qui permet d’atteindre cet objectif, représente les états du qubit, et celle de la direction de l’instrument de mesure, par des vecteurs de l’espace “de Hilbert” H². Il représente la grandeur mesurée - l’observable considérée - par un opérateur “hermitien” agissant dans l’espace des états, ayant :

  1. pour vecteurs propres les deux vecteurs |a, b> et |-b̄, ā> respectivement associés à la direction de référence de l’instrument de mesure et la direction diamétralement opposée. 
  2. pour valeurs propres correspondantes deux nombres réels opposés λ et -λ, lesquels codent l’information binaire délivrée, la valeur absolue de λ étant ici sans signification. 
Extension au système de deux qubits.
Soit maintenant un système de deux qubits. L’idée est de soumettre ce système à une double évaluation, en le faisant interagir avec deux instruments de mesure d’orientation identiques. Chacun de ces instruments possède sa propre direction de référence : le premier, associé au qubit n° 1, la direction spécifiée par un vecteur |a, b> sur la base |↑₁>|, |↓₁> ; le second, associé au qubit n° 2, la direction spécifiée par un vecteur |c, d> sur la base |↑₂>, |↓₂>.


Ces deux instruments, de même nature physique, sont toujours construits pour délivrer une information binaire, avec deux résultats possibles, notés ici respectivement : 1+ et 1- pour le premier instrument, 2+ et 2- pour le second. Au moins lorsque le système est dans un état sous forme de produit tensoriel, donc couplant deux états individuels associés respectivement au qubit n°1 et au qubit n° 2, l’interprétation intuitive de ces réponses est
  1. pour 1+, que l’orientation du qubit n° 1, avant mesure, était probablement plus proche de celle spécifiée par |a, b> que de la direction opposée |-b̄, ā>. L’inverse pour 1-
  2. pour 2+, que l’orientation du qubit n°2, avant mesure, était probablement plus proche de celle spécifiée par |c, d> que de la direction opposée |-d̄, c̄>. L’inverse pour 2-
Il s’agit alors :
  1. d’expliquer la distribution des fréquences respectives des quatre configurations de réponses possibles (1+2+,1+2-,1-2+,1-2-) du dispositif des deux mesures, sur des systèmes préparés de façon identique. 
  2. d’expliquer pourquoi l’ordre des deux opérations de mesure, dès lors qu’elles sont suffisamment rapprochées, n’a pas d'influence sur cette distribution de fréquence.
  3. d’expliquer les configurations de réponses obtenues lors d’une succession de mesures effectuées sur un même système
La théorie quantique nous invite à rechercher les opérateurs pertinents pour fournir ces explications. L’idée est de partir des opérateurs associés aux deux instruments de mesure pris indépendamment, les deux qubits étant considérés comme isolés ; puis de les prolonger pour obtenir deux opérateurs agissant sur l’espace des états du système global. Donc de partir des opérateurs M₁ et M₂ opérant dans l’espace d’états de chaque qubit pris séparément et ayant :

  1. pour M₁ (qubit n° 1), les vecteurs propres (directions opposées) |a, b> et |-b̄, ā>
  2. pour M₂ (qubit n° 2), les vecteurs propres (directions opposées) |c, d> et |-d̄, c̄>

Dans le billet n° 15, j’ai rappelé que ces opérateurs M₁ et M₂ existent bien ; nous savons les construire à partir de la donnée de leurs vecteurs propres : concrètement nous savons calculer les coefficients de leur représentation matricielle à partir des nombres complexes a,b, pour le premier, et c,d, pour le second, ce à un facteur réel près pour chacun d’eux. 


Considérons alors leurs prolongations respectives M̃₁ = M₁ ⊗ I₂ et M̃₂ = I₁ ⊗ M₂. Quelles prédictions peut-on en déduire quant aux distributions des résultats de mesure ?

Absence d’impact de l’ordre des mesures. 
Nous savons déjà que les opérateurs prolongés M̃₁ et M̃₂ commutent : M̃₂M̃₁ = M̃₁M̃₂. Nous pouvons déjà prédire que, si la représentation des mesures par ces opérateurs est juste, l’ordre des mesures n’a aucun impact sur la distribution de fréquences des quatre configurations possibles de résultats. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle il est légitime de parler de mesures simultanées : quelque soit l’ordre exact du déroulement des mesures, par construction incertain si les deux mesures se succèdent sur un très court intervalle de temps, les résultats sont potentiellement les mêmes.


Probabilités à priori des configurations de résultats.
Soit le système des deux qubits dans un état quelconque |m, n, p, q> :

|m, n, p, q> = m|↑₁>|↑₂> + n|↑₁>|↓₂> + p|↓₁>|↑₂> + q|↓₁>|↓₂>

Pour calculer quelles seront, dans cet état, les probabilités d’apparition respectives des quatre configurations 1+2+, 1+2-,1-2+,1-2- de résultats, la théorie quantique nous enseigne qu’il faut d’abord déterminer les vecteurs propres communs aux opérateurs représentant les deux mesures (nous savons déjà que ces vecteurs propres communs existent, dès lors que ces opérateurs commutent).

La construction des opérateurs prolongés ₁ et ₂ amènent les constatations suivantes : 

  1. les produits tensoriels |a, b>|χ> et |-b̄, ā>|χ>, où |χ> est un état quelconque du qubit n° 2, sont vecteurs propres de l’opérateur ₁, avec comme valeurs propres respectives les valeurs propres λ₁ et - λ₁ de l’opérateur M₁ ; il n’en existe pas d’autres.
  2. les produits tensoriels |ψ>|c, d> et |ψ> |-d̄, c̄>, où |ψ> est un état quelconque du qubit n° 1 sont vecteurs propres de l’opérateur ₂, avec comme valeurs propres respectives les valeurs propres λ₂ et - λ₂ de l’opérateur M₂, ; il n’en existe pas d’autres. 
Il s’en suit que l’ensemble des quatre produits tensoriels couplant les directions en jeu (directions de références des deux instruments de mesure et leurs opposées), savoir : 
  1. |a, b>|c, d> , soit (autre notation) |ac, ad, bc, bd>
  2. |a, b>|-d̄, c̄>, soit (autre notation) |-ad̄, ac̄, -bd̄, bc̄>
  3. |-b̄, ā>|c,d>, soit (autre notation) |-b̄c, -b̄d, āc, ād>
  4. |-b̄,ā>|-d̄, c̄>, soit (autre notation) |b̄d̄, -b̄c̄, -ād̄, āc̄> 
sont les seuls vecteurs propres communs aux deux opérateurs ₁ et ₂ (Pour cette raison le couple M̃₁, ₂ possède la propriété d’être un ensemble complet d’opérateurs qui commutent).

Une fois connus les quatre vecteurs propres, la théorie quantique nous enseigne comment calculer les probabilités des quatre configurations de résultats : sous réserve d'une normalisation des vecteurs, la probabilité d'une configuration est le carré de la norme de la projection de l'état du système sur le vecteur propre associé à cette configuration. En se souvenant que la projection s'obtient par un produit scalaire, l'application de cette règle conduit aux formules ci-après : 

Configuration de résultats 1+2+, associé au vecteur propre commun  |ac, ad, bc, bd> :
Prob (1+2+) = | <ac, ad, bc, bd| m, n, p, q> |² = | āc̄m + ād̄n + b̄c̄p + b̄d̄q |²

Configuration de résultats 1+2-, associé au vecteur propre commun |-ad̄, ac̄, -bd̄, bc̄> :
Prob (1+2-) =| <-ad̄, ac̄, -bd̄, bc̄| m, n, p, q> |² = | -ādm + ācn +-b̄dp + b̄cq |²

Configuration de résultats 1-2+, associé au vecteur propre commun |-b̄c, -b̄d, āc, ād> :
Prob (1-2+) =| <-b̄c, -b̄d, āc, ād|m, n, p, q> |² = | -bc̄m -bd̄n +ac̄p + ad̄q |²

Configuration de résultats 1-2-, associé au vecteur propre commun  |b̄d̄, -b̄c̄, -ād̄, āc̄> :
Prob (1-2-) =| <b̄d̄, -b̄c̄, -ād̄, āc̄|m, n, p, q> |² =| bdm -bcn -adp +acq |²


Ces formules se simplifient notablement si la base choisie est calée sur les directions de références des deux instruments, avec a=1, b=0, c=1, d=0. L’expression des probabilités devient alors :

Prob (1+2+) = |m|², Prob (1+2-) = |n|², Prob (1-2+) = |p|², Prob (1-2-) = |q|²

Ces dernière formules montrent que la connaissance des probabilités (approchées à travers des statistiques de fréquences) ne déterminent que les modules des composantes complexes m,n,p,q de l’état, mais non leurs arguments.

Application à un cas particulier.
Supposons que l’état |m, n, p, q> du système des deux qubits prenne la forme d’un produit tensoriel de deux états individuels (eux aussi normés), par exemple |α, β>|γ, δ>. Dans ces conditions, m = αγ, n = αδ, p = βγ, q = βδ. Un calcul intégrant ces valeurs particulières dans les formules générales conduit, après mise en facteur, à :
  1. Prob (1+2+) = |(āα + b̄β)(c̄γ + d̄δ)|² = Prob(1+) Prob(2+)
  2. Prob (1+2-) = |(āα + b̄β)(-dγ+cδ)|² = Prob(1+) Prob(2-)
  3. Prob (1-2+) = |(-bα + aβ)(c̄γ + d̄δ)|² = Prob(1-) Prob(2+)
  4. Prob (1-2-) = |(-bα + aβ)(-dγ+cδ)|² = Prob(1-) Prob(2-)
Autrement dit, les probabilités des configurations de résultats sont identiques à celles que l'on obtiendrait par des mesures faites indépendamment sur deux qubits séparés, et préparés le premier dans l'état |α, β> et le second dans l'état |γ, δ>. Si le système des deux qubits est  dans un état non intriqué, tout se passe comme si on avait affaire à deux qubits isolés.

Si, de plus, l’état du système des deux qubits est l’un des quatre vecteurs propres communs aux opérateurs de mesure, la probabilité de la configuration de résultats correspondante vaut 1, et la probabilité des autres configurations est nulle. Par exemple, supposons que cet état soit |a, b>|c, d> , et donc assimilable au couple des directions spatiales de référence respectives des deux instruments. On a alors α = a, β = b, γ = c, δ = d ; la configuration 1+2+ surgira inévitablement, les autres n’apparaîtront jamais. Les quatre vecteurs propres forment un quadruplet d’états discernables, en ce sens que le couplage des deux instruments de mesure donnent des réponses sûres et différentes pour chacun de ces quatre états.


Etat du système après les deux mesures
La théorie quantique nous enseigne qu’après les deux mesures, le système des deux qubits se retrouve justement dans l’un des états représentés par les vecteurs propres communs, donc un état non intriqué, celui associé à la configuration de réponses fournie. La répétition des mesures, on vient de le voir ci dessus, produira la même configuration, et laissera l’état du système inchangé.


Mesures effectués sur un seul des deux qubits

Considérons enfin le cas où l’on procède seulement à une seule mesure, par exemple sur le qubit n°1, toujours avec le même type d’instrument, avec une direction de référence spécifiée par le vecteur |a, b>. Les deux réponses possibles de l’instrument sont 1+ et 1-. De nouveau, la question posée est a) de connaitre la probabilité de réalisation de l’une où l’autre de ces possibilités et b) de connaître l’état du système après la mesure.


Probabilités de réalisation des deux résultats : la théorie. 
Les deux qubits forment toujours système : l’observable correspondant à la mesure effectuée par l’instrument sur le qubit n°1 est bien une grandeur concernant ce système dans sa globalité. De ce fait, l’opérateur qui le représente est toujours l’opérateur prolongé M̃₁, avec ces deux valeurs propres λ₁ et -λ₁ que nous avons par convention associées respectivement aux réponses 1+ et 1- . Les vecteurs propres de λ₁ et de -λ₁ sont respectivement, on l’a vu plus haut, les produits tensoriels |a, b>|χ> et |-b̄, ā>|χ>, dans lesquels |a, b> est la direction de référence de l’instrument, |-b̄, ā> la direction diamétralement opposée et |χ> un état quelconque du qubit n° 2. Pour cette multiplicité de vecteurs propres, ces valeurs propres sont dites dégénérées. 
  1. L’espace propre de λ₁ (l’ensemble de ses vecteurs propres) est ainsi un espace à deux dimensions. L’une des bases est le couple de produits tensoriels |a, b>|↑₂>, |a, b>|↓₂>, soit encore (autre notation) |a,0,b,0>, |0,a,0,b>
  2. L’espace propre de -λ₁ est aussi un espace à deux dimensions. L’une de ses bases est le couple |-b̄, ā>|↑₂>, |-b̄, ā>|↓₂>, soit encore (autre notation) |-b̄,0,ā,0>, |0,-b̄,0,ā>
Soit donc comme précédemment le système des deux qubits dans un état (supposé normé) ; 
La théorie quantique enseigne alors que :
  1. Prob(1+) est le carré de la norme de la projection de l’état |m, n, p, q> sur l’espace propre de λ₁. 
  2. Prob(1-) est le carré de la norme de la projection de l’état |m, n, p, q> sur l’espace propre de - λ₁.

Probabilités de réalisation des deux résultats : le calcul 
Il ne reste plus qu’à faire les calculs :

La projection de |m, n, p, q> sur l’espace propre de λ₁ est 

(<a,0,b,0|m,n,p,q>)| a,0,b,0> + (<0,a,0,b|m,n,p,q>)|0,a,0,b>

= (ām+b̄p)| a,0,b,0> + (ān+b̄q)|0,a,0,b>

La projection de |m, n, p, q> sur l’espace propre de - λ₁ est 

(<-b̄,0,ā,0|m,n,p,q>)|-b̄,0,ā,0> + (<0,-b̄,0,ā|m,n,p,q>) |0,-b̄,0,ā>
= (-bm+ap)|-b̄,0,ā,0> + (-bn+aq)|0,-b̄,0,ā>

La somme des deux projections redonne bien le vecteur |m,n,p,q>.  Les probabilités, carrés des normes de ces projections valent en conséquence :
  1. Prob(1+) = |ām+b̄p|² + |ān+b̄q|²
  2. Prob(1-) = |-bm+ap|² + |-bn+aq|²
Les vecteurs étant tous normés, on vérifie que la somme des deux probabilités vaut 1.

Comme dans le cas précédent, ces formules se simplifient notablement si la base choisie est calée sur la direction de référence de l’instrument, avec a = 1, b = 0. L’expression des probabilités devient : 

Prob(1+) = |m|² + |n|², Prob(1-) = |p|² + |q|²


Etat du système après la mesure
La théorie quantique enseigne que l’état dans lequel le système se trouve après la mesure est la projection de l’état initial sur l’espace propre de la réponse que l’instrument a donné. Ainsi, le système se trouvera t-il, en reprenant les dernières expressions de ces projections :
  1. avec la probabilité Prob(1+) dans l’état : (ām+b̄p)|a,0,b,0> + (ān+b̄q)|0,a,0,b> soit (autre notation) (ām+b̄p)|a, b>|↑₂> +(ān+b̄q) |a, b>|↓₂>
  2. avec la probabilité Prob(1-) dans l’état : (-bm+ap)|-b̄,0,ā,0> + (-bn+aq)|0,-b̄, 0,ā> soit (autre notation) (-bm+ap)|-b̄, ā>|↑₂> + (-bn+aq)|-b̄, ā>|↓₂>
Les vecteurs |a, b> et |-b̄, ā> se factorisent dans ces dernières expressions. En fin de compte, le système se trouvera : 

  1. avec la probabilité Prob(1+) dans l’état |a, b> ⊗ [(ām+b̄p)|↑₂> + (ān+b̄q)|↓₂>]
  2. avec la probabilité Prob(1-) dans l’état |-b̄, ā> ⊗ [(-bm+ap)|↑₂> + (-bn+aq)|↓₂>]
et, dans le cas d’une base calée sur la direction de référence de l’instrument,
  1. avec la probabilité |m|² + |n|² dans l’état |↑₁> ⊗ (m|↑₂> + n |↓₂>)
  2. avec la probabilité |p|² + |q|² dans l’état |↓₁> ⊗ (p|↑₂> + q |↓₂>)
Paradoxe EPR
Ainsi, après la mesure, le système se trouve-t-il toujours dans un état global non intriqué, décomposable en deux états “individuels”, associés respectivement à chacun des deux qubits. La mesure casse l’intrication initiale éventuelle. De plus, l’état associé au qubit n° 2 dépend de la mesure effectuée sur le qubit n° 1 : les probabilités respectives des résultats qu’un second instrument peut obtenir sur le qubit n° 2 seront différentes, selon que le résultat de la mesure sur le qubit n° 1 a été 1+ ou 1-. La mesure sur le qubit n° 1 “influence” ainsi celle sur le qubit n° 2, alors même que les deux qubits peuvent être rendus très éloignés et qu’aucun message “matériel” ne puisse passer de l’un à l’autre dans le temps séparant les deux mesures. C’est le paradoxe “EPR” qu’Einstein refusait.

Les formules çi dessus suggèrent que l’on peut interpréter l’état |m, n, p, q> comme paramétrant une fonction corrélant un état individuel quelconque |a, b> du qubit n° 1 avec un état individuel du qubit n° 2, fonction s’exprimant par : 

a|↑₁> + b |↓₁> ⇒ [ām+b̄p]|↑₂> + [ān+b̄q]|↓₂>
que l’on peut aussi noter :
|a, b>₁ ⇒ |ām+b̄p, ān+b̄q>₂

Ainsi, un état du système global qu'il soit intriqué ou non, équivaut à la donnée d'un ensemble de couples d'états individuels [|ψ₁>, |χ₂>], donc un ensemble de couples de directions spatiales [θ₁, φ₁], [θ₂, φ₂]. Un tel ensemble s'interprète comme un catalogue prédisant les conséquences d'une mesure sur le qubit n° 1 : soit en effet un expérimentateur, mesurant l’orientation du qubit n° 1 et recevant une réponse positive (1+) avec un instrument dont la direction de référence est [θ₁, φ₁] ; cette réponse lui fait conclure qu’après mesure le qubit est orienté dans cette direction ; suite à cette mesure, le qubit n° 2 sera obligatoirement orienté (exactement) dans la direction [θ₂, φ₂], et toute mesure effectuée ultérieurement par un second expérimentateur sur ce qubit sera contrainte par cet état.


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